Publiciste et architecte, licencié de philo, globe-trotter accompli, passionné par les mœurs des grands singes et enfin dessinateur de BD, Lauzier ne manque guère de cordes à son arc de Sagittaire, et ce n'est pas la dernière qui lui permet de lancer les traits les moins acérés. Sans pitié pour son gibier, il découpe en tranches, là où ça fait le plus mal, l'existence fascinante des primates inventeurs du dîner Molotov et du cocktail mondain.
Comme l'y convie son puissant Soleil dans le neuvième signe, Lauzier prend pour cible favorite l'homo sapiens intégré, fidèle écho des poncifs dominants, suivant inlassablement les parcours fléchés du labyrinthe social comme un rat de laboratoire à la recherche de son gruyère. Inlassablement ? C'est vite dit. Conjointe à Mercure, en carré de Mars-Neptune, la continuité solaire finit par donner des signes de fatigue, plongeant le malheureux sujet en plein ultra-paradoxe. Tout en se vautrant sur son fromage, le voilà qui se plaint d'être "bouffé par le système" et pris d'affreuses nausées à l'odeur de "cette société pourrie". Comment va-t-il s'en sortir, le pauvre ?
La porte rêvée, à l'orée d'un trigone tout confort, c'est au premier chef l'issue mercurienne : remise en cause verbale et verbeuse toujours prudemment amarrée au niveau R, paroles volantes des contestataires dans le vent "surveillant du coin de l'œil l'effet qu'ils font sur la galerie". Risque d'égarement quasi nul : à l'autre bout du trigone, Uranus/Bélier vient à point nommé réintégrer notre disert révolté dans la case R du départ. Avec un roman-choc sur la faillite de sa révolte, par exemple. "La révolution, c'est comme agiter une bouteille où y d'l'eau et d'l'huile. Quand tu t'arrêtes de l'agiter, ben, l'huile et les salauds remontent à la surface." Uranus/Bélier, Jupiter/Vierge, adieu la phase méli-mélo, le sens des contraires a encore frappé. Rendez-vous à la prochaine secousse ...
Mais Mars dissonant, qu'on avait oublié, arrive dans ce traficotage comme un chien dans un jeu de quilles, ou comme ce loubard dans les salons dorés de l'ex-militant : "La plupart des mec, y s'font du cinéma, moi j'peux pas." Et Lauzier de mordre à belles dents tous ceux qui "habillent de grands mots leurs petits appétits", tous ceux qui consomment le divorce des paroles et des actes, prenant le gargouillis de leurs embarras gastriques pour une profondeur de pensée prometteuse de prix littéraires : soixante-huitards gavés, politicailleurs creux, théoricien truqueurs, libérateurs qui cognent.
Pour retrouver notre belle santé homogène, fuyons les vains discours des charlatans, misons plutôt sur le trigone de Mars avec la Lune/Capricorne, soyons crûment réalistes, éteignons tous principes moraux et satisfaisons nos instincts sans l'ombre d'un remords. Plantons là une bonne fois pour toutes le cadre angoissé au carrefour de ses contradictions, comme sa tendre épouse qui se fait la malle avec un aventurier viveur et sans scrupules : "Je préfère les cyniques, au moins on sait où on va ..."
Et comme le cynisme se vend plutôt bien en ce moment, nous en conclurons que Lauzier, fanatique avoué du capitalisme, sait très bien où il va, lui aussi.